Lorsqu’une mère allaite son enfant pendant plusieurs mois ou plusieurs années, il est possible qu’elle devienne de nouveau enceinte pendant cette période. Elle peut alors choisir de poursuivre l’allaitement de son enfant.
Parmi les raisons invoquées pour continuer, certaines mères mentionnent le fait que leur enfant avait encore besoin de ces moments de proximité et qu’il n’était pas prêt à être sevré.
Bien que certaines personnes soulèvent des questions sur la sécurité de l’allaitement pendant la grossesse, cette pratique ne pose aucun risque pour la santé de la mère, du foetus ou de l’enfant allaité.
Quels sont les effets de l’allaitement pendant la grossesse?
Les effets de l’allaitement pendant la grossesse ne sont pas très bien étudiés. Les quelques données existantes semblent toutefois indiquer qu’il y a peu de risques associés à l’allaitement pendant la grossesse si la mère est en santé, si sa grossesse se déroule normalement et si elle n’a pas vécu une grossesse à risque dans le passé.
Voici quelques préoccupations courantes liées à l’allaitement pendant la grossesse.
- Les fausses couches et l’accouchement prématuré
Au moment de l’allaitement, une hormone appelée ocytocine est libérée. Puisque cette hormone est responsable des contractions pendant l’accouchement, certaines mères craignent que l’allaitement pendant la grossesse déclenche une fausse couche ou un accouchement prématuré. Toutefois, l’ocytocine n’est pas produite en quantité suffisante au cours des tétées pour déclencher le travail. De plus, les hormones de la grossesse bloquent l’effet de l’ocytocine. L’utérus y est donc moins sensible jusqu’au moment de l’accouchement. Enfin, des contractions surviennent également pendant les relations sexuelles et ne représentent donc pas un danger pendant une grossesse normale.
Quelques petites études ont d’ailleurs conclu que les femmes qui allaitent ne risquent pas davantage de vivre une fausse couche ou d’accoucher prématurément. Ces études ont toutefois été réalisées auprès de femmes dont la grossesse se déroulait normalement. Celles qui risquent d’accoucher avant la date prévue devraient donc discuter avec leur médecin de leur situation avant de prendre la décision de poursuivre l’allaitement. - Le développement du foetus
Produire du lait demande beaucoup d’énergie. En théorie, le fait d’allaiter pendant la grossesse pourrait donc limiter les ressources disponibles pour le foetus. Toutefois, si la mère s’alimente bien, la plupart des experts s’entendent pour dire qu’il est peu probable que la croissance du bébé soit compromise. Les études réalisées sur le sujet concluent d’ailleurs que l’allaitement a peu ou pas d’effet sur le poids de naissance du nouveau bébé. - La santé de la mère
Allaiter et être enceinte est exigeant pour le corps de la mère. Une étude a d’ailleurs noté que certaines femmes qui allaitent pendant la grossesse ont un niveau plus bas d’hémoglobine, ce qui augmente leur risque de souffrir d’anémie. Il est d’ailleurs recommandé de prendre une multivitamine prénatale contenant de l’acide folique et du fer.
Cependant, les risques nutritionnels pour la mère sont faibles si cette dernière est bien nourrie. Il est donc important pour les femmes qui allaitent pendant la grossesse d’avoir une alimentation variée et équilibrée, riche en fer, en vitamines, en protéines et en minéraux, et de bien s’hydrater.
L’allaitement diminue grandement les chances de concevoir un nouveau bébé, surtout si les 3 conditions suivantes sont réunies :
- les menstruations ne sont pas revenues et aucun saignement n’a été observé;
- le bébé tète au moins toutes les 4 heures le jour et toutes les 6 heures la nuit. L’allaitement se fait sans suivre un horaire et sans limiter la durée des tétées;
- le bébé est allaité exclusivement, c’est-à-dire qu’il ne reçoit aucune préparation commerciale, aucun aliment ni aucune eau;
- le bébé a moins de 6 mois.
La grossesse a-t-elle un impact sur le lait que l’enfant allaité boit?
Pendant la grossesse, la présence de certaines hormones entre en conflit avec la production de lait. Plusieurs mères peuvent ainsi remarquer une baisse de leur production dès la première moitié de la grossesse, en particulier pendant le deuxième trimestre.
Si l’enfant allaité a commencé l’alimentation solide, cette diminution est moins problématique puisque le lait maternel n’est plus son unique aliment. Cependant, s’il a moins de 6 mois et est encore allaité exclusivement, la quantité de lait produite pourrait devenir insuffisante. Il est alors conseillé de rencontrer une consultante en lactation pour déterminer s’il est possible de faire augmenter la production de lait. Sinon, l’enfant pourrait avoir besoin d’un supplément, par exemple le lait de sa mère congelé avant le début de la grossesse. Si la mère ne dispose pas de lait maternel en quantité suffisante, de la préparation commerciale pour nourrisson pourrait être utilisée.
Ces changements peuvent aussi modifier la composition du lait. Par exemple, dans les 2 premiers mois de la grossesse, la concentration en protéines, en sodium et en chlore augmente, alors que la quantité de potassium, de lactose et de glucose diminue. Le lait peut alors prendre un goût salé. Même si certains enfants peuvent alors refuser le sein, ces modifications à la composition du lait n’influeront pas sur son développement.
Certains enfants peuvent également être contrariés par ces changements et se désintéresser de l’allaitement. Un sondage réalisé auprès de femmes qui allaitaient pendant leur grossesse révélait d’ailleurs que, dans 69 % des cas, le sevrage avait lieu pendant le 2e trimestre.
L’arrivée du bébé
Après l’accouchement, il est possible de continuer d’allaiter l’enfant tout en allaitant le nouveau bébé. On parle alors d’allaitement en tandem.
Dans les premiers jours suivant la naissance, les seins produiront le colostrum dont le nouveau-né a besoin. Comme ce lait est en petite quantité, il peut être nécessaire de donner la priorité au bébé. Par la suite, avec la montée de lait, plusieurs arrangements sont possibles selon l’âge et les besoins de l’aîné.
Les malaises liés à l’allaitement durant la grossesse
Environ 75 % des femmes qui allaitent pendant leur grossesse rapportent avoir les mamelons plus sensibles. Cet inconfort serait attribuable aux changements hormonaux en cours. Malheureusement, la plupart des traitements recommandés pour les mamelons douloureux sont habituellement peu efficaces pendant la grossesse. Pour diminuer les sensations désagréables, certaines mères ont recours à des techniques de respiration. Il est aussi préférable de s’assurer que l’enfant prend le sein correctement. Une évaluation par une consultante en lactation pourrait alors être nécessaire.
Par ailleurs, certaines mères disent ressentir un malaise émotionnel au moment des tétées pendant la grossesse. Certaines femmes décrivent cette émotion comme un sentiment d’agacement ou d’irritabilité. Pour gérer ce malaise, il est suggéré de se distraire pendant la tétée en lisant ou en écoutant de la musique par exemple. Les techniques de respiration constituent aussi une bonne option.
Enfin, vers la fin de la grossesse, le ventre de la mère qui prend de l’ampleur rend parfois les tétées plus difficiles. Allaiter couchée peut alors être une solution. Si l’enfant est assez vieux, la mère peut aussi demander sa coopération pour trouver une position confortable.
Si une mère ne parvient pas à trouver une solution pour être à l’aise d’allaiter pendant la grossesse, elle peut choisir de sevrer son enfant. Certaines stratégies comme « ne pas offrir, ne pas refuser » ou comme proposer une distraction sont efficaces pour sevrer graduellement un enfant plus vieux. En offrant des câlins et beaucoup d’attention à l’enfant, il est tout à fait possible de répondre à ses besoins sans l’allaiter.
À retenir
- En absence de contre-indication, l’allaitement pendant la grossesse ne pose pas de risques pour le foetus, l’enfant allaité ou la mère.
- La production de lait de la mère peut diminuer dès la première moitié de la grossesse.
- Certaines femmes enceintes peuvent connaître de petits désagréments pendant les tétées, mais des solutions existent pour gérer la situation.